COMMENT JOUER DU PIANO PLUS FACILEMENT?

Coaching de piano en ligne - niveau avancé

Introduction


1. Les objectifs de ce site
1.1. Certains extraits de nombreux travaux remarquables, portant sur les techniques de piano, sont un peu trop subjectifs. Ils décrivent souvent les mouvements de la main du pianiste d’une façon incomplète ou bien, au contraire, trop scientifique, et donc peu communicative.

Celui qui sait n’a pas besoin d’un mode d’emploi.
Pour celui qui ne sait pas, des explications détaillées sont indispensables.

1.2. De nos jours, même la méthode de Chopin doit faire l’objet d’une approche plus critique. Chopin a mis en opposition sa conception du travail artistique sur la technique, aux exercices mécaniques de Czerny ou de Kalkbrenner (ce dernier, par exemple, conseillait de faire des exercices pratiques tout en lisant un livre, ce qui est déjà un non-sens complet!). La conception de Chopin était certes très novatrice, mais il ne faut pas oublier que ce dernier était un génie ayant une approche intuitive des techniques de piano. Qui serait de nos jours d’accord, par exemple, avec son affirmation selon laquelle il suffirait de s’entraîner trois heures par jour seulement (Dubois/Niecks*)? De plus, chaque pianiste sait que les instruments de la moitié du 19e siècle étaient très différents de ceux d’aujourd’hui. Il est sûr que certaines vérités annoncées par Chopin resteront toujours d’actualité (cf. “le toucher” sur cette page), mais d’autres ont néanmoins été précisées d’une façon plus objective depuis, comme en témoignent les opinions des théoriciens plus récents (cf. les propos de Sielużycki et de Matthay dans les deux cadres ci-dessous).


* Jean-Jacques Eigeldinger - “Chopin vu par ses élèves” p. 49, La Baconnière-Payot, Neuchâtel 1979

 

James Ching: [...] les problèmes techniques peuvent rarement être résolus uniquement d’une manière artistique.
Czesław Sielużycki - “La main du pianiste”, p. 16, PWM, Cracovie 1982

1.3. L’objectif de ce site est de présenter de la manière la plus concise et la plus facile à comprendre les processus mécaniques qui régissent l’Appareil Moteur (AM) du pianiste, lorsque celui-ci joue. Je prendrai en compte l’application pratique des méthodes déjà existantes, mais je donnerai également de nouveaux apports et éclaircissements quant à leurs éventuelles imprécisions. Nous aborderons le thème de l’action consciente du pianiste sur son AM en vue d’obtenir les meilleurs effets musicaux possibles. Ce site ne proposera pas, en revanche, de solutions toutes prêtes pouvant être imitées sans réfléchir et une certaine expérience du piano sera nécessaire. C’est pourquoi il est avant tout destiné à des élèves ou des étudiants disposant déjà d’un certain niveau, mais aussi à tous les amateurs de piano qui souhaiteraient, même de manière théorique uniquement, approfondir leur connaissance de cet instrument.

2. La théorie, la pratique et les virtuoses
2.1. Les jeunes pianistes affirment souvent, à tort, qu’il ne vaut pas la peine de perdre du temps pour étudier la théorie et qu’il suffit juste de s’entraîner longtemps sur un morceau difficile pour qu’il "se joue tout seul" en fin de compte. De la même manière, on a tendance à minimiser l’importance de l’aspect théorique de l’apprentissage d’un morceau. Pourtant, dans la première moitié du 20e siècle déjà, Tobias Matthay a remarqué que

[...] même le génie peut économiser plusieurs années de son temps et se sentir plus en confiance en prenant la peine de maîtriser les faits, aussi bien intellectuellement, qu’«intuitivement».
Tobias Matthay - “The Visible and Invisible in Piano Technique”, p. X (Preface), Oxford University Press, New York 1947

2.2. Le travail d’un génie progresse, sans aucun doute, plus facilement et plus rapidement, mais:

Ce que les élèves les plus talentueux obtiennent intuitivement (avec un travail acharné en parallèle, bien évidemment) est aussi, dans une large mesure, à la portée des pianistes beaucoup moins doués.
Heinrich Neuhaus - “L’Art du piano” p.96, PWM, Cracovie 1970
La traduction française (Heinrich Neuhaus - “L’Art du piano”, Éd. Van de Velde, Paris 1971) ne comprend pas cet extrait.

2.3. Apprendre à jouer du piano, même en étant l’élève d’un grand pianiste, est un processus extrêmement complexe et pas tout à fait réel, car même le meilleur enseignant est incapable de transmettre les mouvements qu’il faut intérieurement sentir soi-même. Voyons l’exemple suivant: j’ai devant moi quelqu’un qui n’arrive pas à garder l’équilibre sur un vélo - même si je sais rouler à vélo, je ne peux expliquer comment atteindre cet équilibre, car comment décrire avec des mots un état qui ne dépend que de mes propres sens? Et ô combien est-il plus difficile d’expliquer la manière d’atteindre l’équilibre sur un clavier? La technique pianistique dépend, en effet, dans une large mesure de l’agilité de la main, pesant près de 4 kg*, sur le clavier.
* Czesław Sielużycki - “La main du pianiste” p. 120, PWM, Cracovie 1982

Par ailleurs, certains pédagogues ne se préoccupent pas toujours de la bonne compréhension de leur cours dispensés à leurs élèves.
Sur Leopold Godowsky: ...de nombreux jeunes pianistes affluaient vers lui dans l’espoir d’obtenir la recette de sa virtuosité. Hélas, Godowsky ne soufflait presque mot de la technique, du moins dans le sens où ces jeunes gens l’entendaient!
Heinrich Neuhaus - “L’Art du piano” p. 22, Éd. Van de Velde, Paris 1971

Et le phénomène dépasse le cadre de la seule pianistique! Comme me le signalent des étudiants d’autres disciplines, des problèmes similaires lors de la transmission d’informations précises par les professeurs, existent aussi dans d’autres domaines, comme la médecine ou l’architecture, ce qui inquiète encore plus.

2.4. Certains éléments et moyens techniques peuvent être observés chez les bons pianistes et nous pouvons tenter de les appliquer dans notre propre façon de jouer. D’autres, en revanche, ne sont pas visibles ni du premier rang de la salle, ni sur les mains filmées en gros plans, car certaines forces opèrent de manière invisible (c’est de cette constatation qu’est né un travail remarquable de T. Matthay, intitulé “Le visible et l’invisible dans la technique pianistique”). Par ailleurs, plus le pianiste est expérimenté, plus il économise ses mouvements, et donc il est encore plus difficile d’«épier» comment il procède. Mieux encore, même en prenant des cours auprès d’un virtuose célèbre on n’est pas certain qu’il puisse résoudre nos problèmes techniques, car étant donné qu’il joue lui-même à la perfection il peut, tout simplement, ignorer la solution à un problème qu’il n’a jamais connu. En effet, les virtuoses possédant leur technique innée jouent instinctivement et ne se rendent pas toujours compte de l’origine de leur prédisposition. C’est pourquoi les conseils didactiques qu’ils proposent omettent souvent des détails très importants.

2.5. Notons par la même occasion que le terme “virtuose” inspire respect et admiration, même si tous les types de virtuosité ne méritent pas réellement une telle considération. L’agilité technique du pianiste devrait donner vie à la conception du compositeur de la manière la plus fidèle possible. Pourtant, il arrive que même des pianistes célèbres abusent de leur facilité de mouvements en jouant beaucoup trop vite, non seulement par rapport aux notes, mais aussi par rapport au bon goût musical. Cette tendance à surjouer pour impressionner un public non averti musicalement parlant, peut être placée au même rang que la manière de certains chanteurs qui allongent abusivement les notes aiguës plus longues uniquement pour "donner de la voix". Ces deux attitudes ne sont qu’un boniment qui déforme le texte musical d’origine.


3. Le paradoxe du mécanisme du piano

3.1. Pour revenir à la complexité des techniques de piano, je rappellerai ici, à l’instar de Czesław Sielużycki, deux citations:
● Selon F. H. Péru*, Chopin obtenait des sonorités diverses d’une même touche en la frappant de vingt façons différentes.
Leopold Godowsky affirme que “seul un bon pianiste connaît au moins une dizaine de façons de frapper une touche”.


* F. H. Péru (1829 ou 1830-1922) – pianiste et compositeur français. Il a prétendu avoir été un élève de Fryderyk Chopin, mais aucune preuve ne permet de confirmer ou contredire cette affirmation. Avec Jules Massenet, il a contribué à ériger la statue de Fryderyk Chopin dans le jardin du Luxembourg à Paris.

 

3.2. L’un des plus grands paradoxes dans le domaine du piano est le fait que toute cette diversité de mouvements (Godowsky) permettant d’obtenir une richesse de sonorités (Chopin) n’est déterminée que par un seul paramètre physique: la vitesse de frappe des touches, c’est-à-dire la vitesse avec laquelle la corde est frappée par le marteau!

La création du son: plus la vitesse de frappe sur la corde est grande, plus le volume sonore augmente [...] Il n’y a aucun autre moyen.
Tobias Matthay - “The Visible and Invisible in Piano Technique” p. 6, Oxford University Press, New York 1947

3.3. Czesław Sielużycki, en tant que médecin, affirme que la “main” ( un membre à part entière) contient presque 50 muscles. Dans son ouvrage, “La main du pianiste”, il décrit, par ailleurs, près de 40 sortes de mouvements susceptibles d’être utilisés pour jouer du piano. Je ne crois pas personnellement qu’il soit nécessaire de maîtriser tous ces mouvements pour pouvoir bien jouer du piano. D’autant plus que, comme l’affirme l’auteur, ces méthodes se révèlent peu efficaces dans la pratique. Il est certainement plus judicieux de comprendre les règles générales qui régissent l’AM (ce que je propose sur ce site) et ensuite de former son propre arsenal de moyens techniques basés sur ces fondements. Voilà ce que devrait être l’objectif primordial de l’apprenti pianiste.

Heinrich Neuhaus

3.4. Enfin, je souhaiterais vous mettre en garde: Une conscience claire et objective des mécanismes basiques du jeu peut améliorer fortement la technique pianistique et raccourcir dans une grande mesure la période d’entraînement. Cependant, il faut garder à l’esprit qu’il ne sert à rien de trop analyser le travail de ses propres muscles et des articulations lorsque l’on joue. Ceci peut même être néfaste. Neuhaus se moquait même de cette approche trop “chirurgicale” du jeu en disant:

Si je parviens à réaliser ce que j’ai conçu […], il m’est parfaitement indifférent de savoir ce que font pendant ce temps mon coude et mes amis supinateurs et pronateurs et si le pancréas est impliqué dans mon travail.
Heinrich Neuhaus - “L’Art du piano” p. 102, Éd. Van de Velde, Paris 1971

Travaillons donc raisonnablement, en gardant une certaine mesure et des proportions convenables!

 


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